En voilà un film doublement
étonnant! Tout d'abord comment un tel projet
est-il tombé entre les mains d'un Zemeckis, réalisateur éclectique, certes, et
ayant pignon sur rue à Hollywood, mais pas franchement versé dans le
fantastique ? On peut tout à fait concevoir qu'un Barry Sonnenfeld ou même
un Tim Burton n'aurait pas été trop difficiles à convaincre. La deuxième chose
qui étonne avec La Mort vous va si bien c'est que Zemeckis étant
un réalisateur très connu ( on parle de Monsieur Forrest Gump, Retour
vers le Futur et Seul au Monde tout de même!)
comment se fait-il que La Mort vous va si bien ne soit pas, lui,
un film hyper connu ? Certainement pas la faute à son casting : Meryl
Streep, Goldie Hawn, Bruce Willis et Isabella Rossellini, excusez du peu !
La
Mort vous va si bien raconte la ( longue ) histoire de rivalité entre
deux femmes – véritables ennemies pour la vie – qui passent leur temps à se
battre pour le même homme mais surtout pour déterminer qui a le plus réussit
dans la vie et qui est la plus belle. Et c'est là qu'on trouve le thème
principal du film : la difficulté d'accepter les ravages du temps pour des
femmes mûres et vaniteuses. On se dit qu'il aura fallu pas mal d'autodérision à
Meryl Streep et à Goldie Hawn pour accepter et pour autant (visiblement)
s'amuser avec leurs rôles. Et que dire de Bruce Willis ? Loin de son
registre musclé à la John Mc Clane, il incarne un type bedonnant,
impuissant ( dans tous les sens du terme) , un pataud, un velléitaire dépressif
ahuri ( sorte de cocktail entre Droopy, Peter Sellers et Rick Moranis!) qui se
retrouve coincé entre deux tigresses. On se souvient alors que Bruce Willis a
toujours été drôle. Le trio d'acteurs opte pour un jeu outrancier afin de
servir l'humour macabre de l'histoire. Soulignons également l'excellente
prestation d'Isabella Rossellini, belle ( comme le Diable?) et magnétique à
l'écran. Les scènes où elle apparaît sont particulièrement bien amenées.
Tient-on
là un film féministe puisque ici les
femmes dominent ? Pas sûr, pas sûr. Les personnages de Streep et Hawn se
révèlent être des mégères, de vraies harpies, capricieuses et à l'ego
surdimensionné. Elles refusent de vieillir, de voir leur beauté flétrir, dans
un déni des lois naturelles qui les rend pathétiques. De même, le personnage
d'Isabella Rossellini, par qui la tentation de la jeunesse éternelle apparaît,
est une véritable Méphistophélès au féminin ( tu le sens là, le mythe de
Faust?). Toutes trois représentent une critique de la vanité des actrices mais
aussi, d'une manière générale, de tout ce culte de l'apparence et du jeunisme
qui sévit dans nos sociétés actuelles. Pour sûr, le film a dû faire grincer des
dents car il clame haut et fort que miser tout sur l'apparence c'est devenir un
objet. L'humain vit, vieillit et meurt. L'objet non, du moins tant qu'on le
retape...
Niveau
réalisation, Zemeckis se montre indéniablement inspiré. Le film est truffé de
trouvailles visuelles. Le coup du « trou » (je ne vous en dirai pas
plus!) est bluffant. Tout comme l'effet « feu imaginaire » sur les
lunettes de Bruce Willis, par exemple. Sans parler de toute une palette
d'effets comme les jeux d'ombres, les arrière-plans particulièrement efficaces
et qui en disent long, etc...
S'il
ne partage pas forcément cet amour sans limite pour les freaks qui était
l'apanage de La Famille Addams, La Mort vous va si bien
a en commun avec le film de Sonnenfeld ce goût pour l'humour macabre, grinçant
et vachard. C'est aussi une œuvre qui se pare d'atours gothiques et d'une photo
riche en couleurs que n'aurait pas renié la Hammer. On sent que cet aspect là a
été très travaillé, même si La Mort vous va si bien est avant
tout une comédie satirique et horrifique. Son respect pour le genre nous fait
penser à un autre film : le Frankenstein Junior de Mel
Brooks.
Malgré
quelques excès ( fort excusables) dans le jeu outrancier du duo Streep/Hawn qui
peut lasser et agacer un chouïa à la longue, le film dégage une telle énergie
et bénéficie d'un gros capital sympathie qui font qu'il emporte la mise haut la
main. Bref, on rit, on en prend plein les mirettes et on se laisse séduire par
ce petit bijou d'humour macabre.
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