samedi 19 mai 2018

La Cara Oculta ( 2011) de Andrés Baiz

Adrian, un jeune et séduisant chef d'orchestre au sein du Philharmonique de Bogota ( s'cusez du peu !) , vient de se faire plaquer par sa très ( mais alors très) jolie petite amie, Belen (Clara Lago). Il noie son chagrin dans un bar, à grands coups de whisky. Mais tout n'est pas perdu pour lui car il tape rapidement dans l'oeil d'une des serveuses, la très jolie aussi Fabiana ( Martina Garcia). Cette dernière semble ravie, bien que sincèrement attirée par Adrian ( Quim Gutierrez) d'avoir mis le grappin sur un type qui a de la plata comme on dit en Colombie. De l'oseille quoi. Sa relation avec Adrian va ouvrir à Fabiana les portes de la haute société.
 
Emerveillée elle l'est également par la magnifique maison de campagne dans laquelle vit Adrian ( certes en tant que locataire mais faut tout de même avoir les moyens).
 
Oui mais voilà, passé l'enchantement des premiers moments, la maison va vite paraître bizarre aux yeux de la toute nouvelle compagne du jeune chef d'orchestre. 
 
Des bruits étranges qui passent par la tuyauterie, par exemple. Ou bien ce miroir dans la chambre qui semble tellement la fasciner. Cette maison cache un secret, c'est sûr. Dehors, le tonnerre éclate un peu trop souvent pour être honnête.
 
La Cara Oculta est un film qui repose sur une idée très forte et astucieuse. Il y a indéniablement de la créativité et de la débrouillardise dans ce projet. C'est de là qu'il tire toute son originalité. Mais tâchons de faire attention de ne pas trop en dire...
 
Si la première partie, à travers le personnage de Fabiana, permet au film de se révéler très malin dans sa façon de jouer avec son public, la deuxième partie en flashback nous permet de connaître les raisons de la disparition de Belen. C'est elle qui détient le secret de la maison, secret qui lui a été confié par la propriétaire même des lieux.
 
La situation dans laquelle elle va se trouver provoque immédiatement un écho très fort chez le public, tant elle est liée à une de nos peurs les plus primitives. Là , le film nous scotche viscéralement. Mais ce n'est pas tout ! La Cara Oculta continue à nous surprendre au fur et à mesure que l'histoire avance. Il a plus d'une flèche à son arc. Une thématique très à la Edgar Poe, par exemple. D'autres questions très intéressantes sont posées : que ressent-on lorsqu'on assiste, impuissant, à la chose que l'on redoutait le plus ? Quel effet ça fait de découvrir comment réagissent les gens lorsqu'ils ne sont plus en train de jouer la comédie qui régit les rapports humains, lorsqu'ils sont parfaitement eux-mêmes ? L'effet vertigineux des réponses est garanti !
 
Le film se révèle un petit bijou de construction narrative, tellement toutes les pièces du puzzle s'emboîtent parfaitement. Cela créé une dynamique qui rend La Cara Oculta trépidant, sans oublier de toujours apporter cette petite touche de noirceur et de cruauté, cerise sur le gâteau !
 
Certes, la caméra d'Andrés Baiz n'est pas d'une virtuosité exceptionnelle mais c'est tout de même un réalisateur qui a le sens de l'image qui marque les esprits. Le garçon, même s'il a continué à travailler occasionnellement pour le cinéma après La Cara Oculta , semble maintenant plus tourné vers les séries télé. Dommage, le potentiel est là et on espère le revoir un jour aux manettes d'un bon projet ciné. Surtout que André Baiz a eu les cojones de doter son film d'un final bien cynique, même s'il est ouvert à l'interprétation de chacun. On ne baisse pas son froc ici ! On est pas chez les bisounours du cinéma mainstream hollywoodien!
N'oublions pas également l'aide précieuse de la musique classique ( présente ici bien naturellement à travers le personnage d'Adrian) ainsi que de la partition du compositeur Federico Jusid, très vivace, qui apporte sa pierre à l'édifice de ce film qui se dévore avec gourmandise.
 
La Cara Oculta prouve qu'avec des idées tout est possible, pas besoin forcément d'une montagne de billets pour faire un très bon film, contrairement à ce qui semble être la norme aujourd'hui. Ici pas d'acteurs hyper connus ( du moins internationalement. Même si Clara Lago s'est ouvert les portes d'Hollywood récemment avec un petit rôle dans le nouveau Liam Neeson) mais tout le monde fait le job. Et le résultat a sacrément de la gueule !
 
 
 
 
 

mardi 8 mai 2018

Under the skin ( 2013) de Jonathan Glazer

Sur des images de l'Espace, dignes d'un 2001 Odyssée de... l'Espace ...voilà comment démarre ce très beau film de Jonathan Glazer. Une voix féminine s'exerce à prononcer des syllabes puis des mots ; elle apprend à parler. Puis un mystérieux motard fait son apparition. Il récupère le corps inanimé d'une jeune femme sur le bord de la route. La pauvre malheureuse se fera dépouiller de ses vêtements, le tout filmé sur un fond blanc pas naturel du tout ! Et par qui se fait elle déshabiller? Par une réplique d'elle même ( Scarlett Johansson) ! Après un passage au centre commercial afin de s'équiper pour sa "mission", la réplique venue de l'Espace se verra confier les clefs d'une camionnette. Elle va pouvoir patrouiller dans les rues d'une grande ville écossaise, pour chasser le mâle ! Voilà pour le pitch.
 
Malgré le fait qu'il repose entièrement sur les épaules de la méga star hollywoodienne qu'est Scarlett Johansson, on ne peut pas dire qu' Under The Skin soit un film hyper connu. D'ailleurs son réalisateur n'avait pas à l'époque ( et n'a toujours pas à présent) une filmographie des plus fournies et reconnues. Ceci est dû, à mon avis, à l'extrême étrangeté que tout le film dégage. C'est une oeuvre essentiellement sensorielle et jusqu'au boutiste. Pas très mainstream tout ça ! Scarlett y livre une prestation minimaliste et d'une grande froideur, parfaitement adaptée à son personnage totalement dénué d'émotions et d'expressivité. 

Pour installer cette impression d'étrangeté Glazer utilise avec parcimonie la musique. La plupart du temps le seul accompagnement sonore auquel on a droit sont les bruits de la rue. Ce choix augmente l'effet d'immersion auprès du public et contribue au style épuré du film. Ce n'est que sur des moments clé que la musique ( de l'électro sombre ou des violons grinçants) entre en jeu avec un certain goût pour la dissonance et l'étrangeté, cela va de soi. 

Glazer se paie aussi de jolis moments d'expérimentation visuelle, comme par exemple des fonds noirs qui abolissent l'espace autour des personnages, créant par là un autre environnement, une autre dimension dans laquelle les proies de la Scarlett s'enfoncent inexorablement, comme s'ils se faisaient engloutir par des marécages invisibles. C'est visuellement fascinant et diablement audacieux.
 
Le réalisateur prend le temps de filmer les rues, les gens, et cela donne un aspect presque de documentaire, par moments. Ceci créé un intéressant contraste avec les moments plus clipesques et expérimentaux du film. Et le moins que l'on puisse dire c'est que Jonathan Glazer a le sens de l'image marquante et troublante. Tout, même le choix de l' Ecosse, semble avoir été pensé minutieusement. Car, même si Glazer montre un intérêt certain pour les paysages écossais, on peut se dire que l'accent écossais ( pour moi parfaitement incompréhensible !) participe également à la bizarrerie du film.
 
En se plaçant souvent dans la perspective de l'alien, le réalisateur nous tend un miroir pour nous montrer toute l'étrangeté du monde humain. Scarlett Johansson réussit parfaitement à nous transmettre l'idée que son personnage est intrigué et décontenancé par cette virée sur Terre. Se détournant de sa mission, elle va vouloir faire l'expérience de notre monde ( en faisant des trucs de fou genre essayer de manger une part de gâteau ou prendre le bus ! ).

De là viendra l'évolution du personnage. Elle se montrera capable de faire preuve de libre arbitre. Fascinée par le monde qu'elle découvre et par son enveloppe charnelle, elle désobéira. La sensualité de Scarlett Johansson fait ici des merveilles. Elle n'est peut être pas la plus grande actrice de tous les temps mais elle montre ici quand même une certaine capacité à changer de registre. Entre la Scarlett de Lost in Translation, Ghost in the Shell, Match Point et donc ce Under the skin, on peut dire qu'elle sait jouer des rôles variés.
 
Pour conclure, je dirais que peu de film nous assène un final aussi bluffant et magnifique, rendu encore plus efficace par le rythme lancinant de cette oeuvre inclassable. On espère donc que son réalisateur puisse donner suite à cet excellent travail.

 
 

Bad Moon ( 1996) de Eric Red

Alors qu'il sont en pleine expédition au Népal, Ted Harrison et sa petite amie Marjorie, vont être sauvagement attaqués par un ...