vendredi 6 avril 2018

Altered States ( 1980 ) de Ken Russell

Professeur à Harvard, Eddie Jessup ( William Hurt ) travaille sur les modifications des états de conscience, notamment par l'intermédiaire des drogues. Bien avant de devenir un scientifique, jusqu'à ses 16 ans pour être précis, Eddie était un fervent esprit religieux. C'est le décès de son père qui l' a "amputé" de Dieu, tant il juge cette mort injuste, inacceptable et cruelle. Fâché avec le Seigneur, Jessup cherche alors à accéder au Soi originel de l' Homme puisque, pour lui, Dieu est mort.
 
Scientifique respecté, heureux époux d'une femme brillante qui l'aime passionnément, le professeur Jessup ne parvient pas malgré tout à se contenter de cela ; il se sent à l'étroit dans sa vie de couple et dans la vie en société, de manière générale. Il lui faut trouver le moyen d'accéder à un autre niveau de conscience, pour retrouver sa vraie âme, son vrai moi d'origine. Bref pour se connecter à la Vérité avec un Grand V et au divin. Mais c'est aussi pour lui une échappatoire à cette vie pleine de souffrances et d'illusions, où tout se termine toujours mal.
 
Jessup va faire la découverte d'une drogue utilisée par des sorciers mexicains qui permet de retrouver son "âme première". Une âme d'avant la naissance. Inutile de dire que notre scientifique va sauter sur l'occasion pour tester cette drogue et réaliser lui-même ce très dangereux voyage de l'âme. Et ce, contre l'avis de ses collègues, plus prudents ( notons ici la présence de Bob Balaban, réalisateur du génial Parents, déjà chroniqué ici-même par votre humble serviteur).
 
Le réalisateur anglais Ken Russell - auteur également de Les Diables ( 1971 ) et de Gothic ( 1986 ) - réussit ici un sacré tour de force, un film d'horreur qui brasse bon nombre de thèmes hyper intéressants sans oublier d'être un pur voyage sensoriel et hallucinatoire. Visuellement renversant et intellectuellement vivifiant, Altered States est un film d'horreur très efficace et original.

Ken Russell utilise notamment la musique comme un outil mystique, quelque chose qui permet d'illustrer ce voyage de l'âme. Ce recours à une musique entêtante, parfois chaotique, plonge le spectateur au coeur même des visions et des rêves de Jessup. De même le solide sens de l'image dont fait preuve Russell lui permet de rendre compte au plus près de ce qu'est la transe de Jessup. Optant tout d'abord pour un montage frénétique, quasi épileptique, puis en enchaînant avec une séquence plus longue et de toute beauté, le réalisateur anglais parvient à donner un côté dantesque aux visions de son personnage.

En terme d'influences Docteur Jekyll et Mister Hyde en est une d'évidente. Mais on lui trouvera également des affinités cronenbergiennes tant le film présente des éléments de body horror ( notamment l'idée que l'esprit peut altérer génétiquement le corps et donc le "sculpter" à sa guise ) très proches de l'univers du cultissime réalisateur canadien. La parenté avec The Fly saute aux yeux, tout comme les hallucinations visuelles nous rappelle un certain 2001, l'odyssée de l'espace de Maître Kubrick.

Altered States explore la terreur provoquée par la découverte des mystères contenus dans notre mémoire génétique.  Les expériences borderline de Jessup,  véritables tentatives de trouver Dieu, donneront au spectateur un aperçu de ce que pourrait éventuellement être le Chaos et la Création. Le vertige, la terreur et la beauté sont au rendez-vous, en tout cas.

Mais revenons au professeur Jessup ; c'est lui le film, même si Emily, son épouse, joue un rôle important. Maintes fois cette dernière lui dit qu'elle l'aime, mais Jessup ne répond pas. Seule son expérience compte pour lui, finalement. Et où tout cela le conduira-t-il ? Et bien à un retour à une conscience primitive, sauvage, axée sur le fait de tuer pour manger et survivre.
 
Comme tous les mystiques, Jessup se fout de la réalité superficielle de son existence, de ce qui change et n'est que de passage. Ce qu'il veut c'est connaître l'Immuable, la Vérité absolue et éternelle. Mais cette dernière est trop vaste, et donc ô combien dangereuse, pour la petite chose fragile, extrêmement limitée en terme de compréhension, qu'est l'être humain.


 
 
 

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