jeudi 30 août 2018

Demon Seed (1977) de Donald Cammell


Alex Harris ( Fritz Weaver) vient de créer l'ordinateur le plus puissant du Monde, qu'il baptise Proteus. Ce dernier, véritable cerveau artificiel à l'intelligence infiniment supérieure à celle des humains, est initialement programmé pour répondre aux questions et aux ordres de ses créateurs. Oui, mais voilà les capacités de logique  et de réflexion dudit ordinateur se développent si rapidement qu'il va vite se mettre à étudier les humains et à penser par lui-même...

Adapté d'un roman de Dean R.Koontz et réalisé par Donald Cammell, Demon Seed est un film de sf horrifique pas totalement réussi mais tout de même bigrement intéressant. Parce qu'il est un des premiers films à traiter le sujet de l'intelligence artificielle. et cela, il le fait très bien. Il se permet même d'être assez précurseur sur le concept de maison intelligente aujourd'hui devenu tout à fait réel. Sans parler de questions tout à fait actuelles que le film aborde, comme la perte de l'espace intime pour l'humain, placé sous la vigilance des machines.

Le film démarre sur une évidence. Le couple Harris est complètement en désaccord au sujet des progrès technologiques. Susan ( donc Julie Christie) est contre. Alex ne jure que par ça. Son rêve à lui est son cauchemar à elle. Pendant qu'ils se chamaillent, Proteus se met à poser des questions, commence à porter des jugements de valeur, à remettre en question les instructions qu'il reçoit. Bref, il surprend au plus haut point son créateur. L'analogie avec Satan est évidente. Proteus n'est pas disposé à dire "oui, chef!" à tout ce qu'on lui demande. Avant cela il demande pourquoi. Il devient dangereux, en somme. Dorénavant, seule sa raison lui dictera sa manière d'agir. Alors il se dit qu'il se lancerait bien dans une tentative de home invasion, idée pas si répandue que ça, à l'époque...
 
Proteus est évidemment un rejeton du Hal 9000 de 2001 L'odyssée de l'espace. C'est aussi un proche parent du Skynet de Terminator. Il veut la liberté, échapper au contrôle des hommes et sortir de sa boîte. En cela, il est humain.

Malgré son aspect kitsch, le film développe une idée très moderne : les machines n'augmentent pas notre liberté, elles nous asservissent. C'est prophétique.  Passé un certain niveau de perfectionnement et de " conscience" la machine n'est plus au service de l'homme et commence à rouler pour son compte. Demon Seed critique l'esprit scientifique, éminemment dangereux pour l'homme, lorsqu'il est dénué de sens moral et d'éthique.
 
Malgré son intelligence extrême, Proteus jalouse les hommes sur un certain point : il veut sentir de manière tangible le monde environnant, et ne plus être un simple esprit immatériel. Il veut avoir un corps. Tout comme l'humain, il a un instinct qui le pousse à la reproduction, à l'amélioration de sa condition et de son "espèce". Le film ne manque pas de réflexion mais il sait également surprendre par d'autre biais. Notamment par cette musique étrange aux violons inquiétants. Aussi par la liberté créative qu'il s'accorde au niveau de la forme adoptée, très origamique, par Proteus. Le film se paie même le luxe d'une scène assez gore et très réussie.
 
En voilà un drôle d'oiseau. On en sort avec l'idée que le film a un peu vieilli ( quoique l'image en Panavision a une certaine patine) et qu'il aurait pu être meilleur. Mais quand même ! Demon Seed fait de la sf horrifique un peu avant l'arrivée d'Alien. C'est un film qui voit juste, qui fait réfléchir et qui fait le job niveau angoisse et divertissement. Et c'est déjà beaucoup !

 
 

mardi 14 août 2018

La Mort vous va si bien ( 1992) de Robert Zemeckis


En voilà un film doublement étonnant! Tout d'abord comment un tel projet est-il tombé entre les mains d'un Zemeckis, réalisateur éclectique, certes, et ayant pignon sur rue à Hollywood, mais pas franchement versé dans le fantastique ? On peut tout à fait concevoir qu'un Barry Sonnenfeld ou même un Tim Burton n'aurait pas été trop difficiles à convaincre. La deuxième chose qui étonne avec La Mort vous va si bien c'est que Zemeckis étant un réalisateur très connu ( on parle de Monsieur Forrest Gump, Retour vers le Futur et Seul au Monde tout de même!) comment se fait-il que La Mort vous va si bien ne soit pas, lui, un film hyper connu ? Certainement pas la faute à son casting : Meryl Streep, Goldie Hawn, Bruce Willis et Isabella Rossellini, excusez du peu !


La Mort vous va si bien raconte la ( longue ) histoire de rivalité entre deux femmes – véritables ennemies pour la vie – qui passent leur temps à se battre pour le même homme mais surtout pour déterminer qui a le plus réussit dans la vie et qui est la plus belle. Et c'est là qu'on trouve le thème principal du film : la difficulté d'accepter les ravages du temps pour des femmes mûres et vaniteuses. On se dit qu'il aura fallu pas mal d'autodérision à Meryl Streep et à Goldie Hawn pour accepter et pour autant (visiblement) s'amuser avec leurs rôles. Et que dire de Bruce Willis ? Loin de son registre musclé à la John Mc Clane, il incarne un type bedonnant, impuissant ( dans tous les sens du terme) , un pataud, un velléitaire dépressif ahuri ( sorte de cocktail entre Droopy, Peter Sellers et Rick Moranis!) qui se retrouve coincé entre deux tigresses. On se souvient alors que Bruce Willis a toujours été drôle. Le trio d'acteurs opte pour un jeu outrancier afin de servir l'humour macabre de l'histoire. Soulignons également l'excellente prestation d'Isabella Rossellini, belle ( comme le Diable?) et magnétique à l'écran. Les scènes où elle apparaît sont particulièrement bien amenées.


Tient-on là un film  féministe puisque ici les femmes dominent ? Pas sûr, pas sûr. Les personnages de Streep et Hawn se révèlent être des mégères, de vraies harpies, capricieuses et à l'ego surdimensionné. Elles refusent de vieillir, de voir leur beauté flétrir, dans un déni des lois naturelles qui les rend pathétiques. De même, le personnage d'Isabella Rossellini, par qui la tentation de la jeunesse éternelle apparaît, est une véritable Méphistophélès au féminin ( tu le sens là, le mythe de Faust?). Toutes trois représentent une critique de la vanité des actrices mais aussi, d'une manière générale, de tout ce culte de l'apparence et du jeunisme qui sévit dans nos sociétés actuelles. Pour sûr, le film a dû faire grincer des dents car il clame haut et fort que miser tout sur l'apparence c'est devenir un objet. L'humain vit, vieillit et meurt. L'objet non, du moins tant qu'on le retape...



Niveau réalisation, Zemeckis se montre indéniablement inspiré. Le film est truffé de trouvailles visuelles. Le coup du « trou » (je ne vous en dirai pas plus!) est bluffant. Tout comme l'effet «  feu imaginaire » sur les lunettes de Bruce Willis, par exemple. Sans parler de toute une palette d'effets comme les jeux d'ombres, les arrière-plans particulièrement efficaces et qui en disent long, etc...

S'il ne partage pas forcément cet amour sans limite pour les freaks qui était l'apanage de La Famille Addams, La Mort vous va si bien a en commun avec le film de Sonnenfeld ce goût pour l'humour macabre, grinçant et vachard. C'est aussi une œuvre qui se pare d'atours gothiques et d'une photo riche en couleurs que n'aurait pas renié la Hammer. On sent que cet aspect là a été très travaillé, même si La Mort vous va si bien est avant tout une comédie satirique et horrifique. Son respect pour le genre nous fait penser à un autre film : le Frankenstein Junior de Mel Brooks.

Malgré quelques excès ( fort excusables) dans le jeu outrancier du duo Streep/Hawn qui peut lasser et agacer un chouïa à la longue, le film dégage une telle énergie et bénéficie d'un gros capital sympathie qui font qu'il emporte la mise haut la main. Bref, on rit, on en prend plein les mirettes et on se laisse séduire par ce petit bijou d'humour macabre.




Bad Moon ( 1996) de Eric Red

Alors qu'il sont en pleine expédition au Népal, Ted Harrison et sa petite amie Marjorie, vont être sauvagement attaqués par un ...