Les Wurdalaks, nouvelle écrite par Tolstoï, aura eu la chance d'être bien adaptée à deux reprises au cinéma. Tout d'abord dans les Trois Visages de la Peur, l'un des chefs d'oeuvre de Mario Bava ( dans son segment du milieu). Puis, donc, dans le film qui nous intéresse aujourd'hui : La Nuit des Diables. La comparaison n'est pas à l'avantage de ce dernier ( même si le film de Ferroni a le mérite de développer davantage l'histoire) tant le Bava place la barre très haut visuellement parlant. Mais notre Giorgio s'en tire tout de même très bien !
On peut se dire que Bava a eu raison d'opter pour un format assez court, avec un récit plus condensé, car La Nuit des Diables ( qui fait 1H40) contient quelques temps morts. Rien de grave, néanmoins, étant donné que le dernier tiers du film compense haut la main tous ces petits défauts, notamment grâce à sa capacité à dégager une véritable atmosphère de cauchemar. J'ai trouvé ça diablement réussi, pour le coup.
Au final, je n'ai pu m'empêcher de me poser cette question : et si le film avait été tourné de nos jours, quel aurait été le résultat ? Probablement trouverait-on un cinéaste capable de davantage développer les différents personnages. De même serait-il possible d'installer une ambiance plus lancinante dans les deux premiers tiers du film. Possible. Mais, nos cinéastes actuels auraient-ils conclu le film aussi bien que notre bon vieux Giorgio ? Pas sûr du tout. Ferroni n'a pas la maestria de Bava. Trop rares sont les moments où il se permet de véritables audaces de réalisation. Mais bon, c'est un artisan compétent, capable, à un moment donné, d'une fulgurance. Et ça tombe bien parce que l'inspiration lui est venue au bon moment dans La Nuit des Diables. Jugée sur son dernier tiers, on se dit que le cinéma actuel aurait bien du mal à reproduire une oeuvre pareille.
Visuellement parlant, le cinéma italien nous a habitués à plus de générosité. Là encore c'est du sous Bava, mais c'est déjà pas si mal!
Rien à dire sur les acteurs ( tous moyens/pas mal sans plus) sauf au sujet de la gamine qui joue Irina ( la petite sur la photo ci-dessus, vous l'aurez compris) que j'ai trouvée vraiment très bien
L'histoire ? Ah bah oui, ça serait pas mal d'en parler un peu ! Nous sommes en Europe de l'Est. Un jeune homme (Nicola) est en train de traverser une forêt en voiture. Après avoir cru apercevoir une silhouette au bord de la route, Nicola fait une embardée et se plante dans le décor. La voiture, trop amochée, ne repart pas. Il part à pied pour demander de l'aide et tombe sur cette famille de paysans étranges. Ces derniers viennent juste d'enterrer le frère du chef de famille. Rapidement on apprend que le mort est décédé depuis un mois et que tout ce malheur est dû au fait qu'il fricotait avec une sorcière. Nicola, homme civilisé du XXème siècle, ne peut croire aux légendes et superstitions encore en vigueur dans ce lieu oublié par l'ère moderne. En attendant, tout le monde dans le coin est parti, sauf cette famille ! Ces gens, une fois la nuit venue, se barricadent chez eux. Pas question de mettre le nez dehors !
On est tout près de la lumière rassurante des villes mais pourtant ici le vieux monde, sauvage et ténébreux, subsiste toujours. Ce thème a inspiré beaucoup de monde par le passé.
Les wurdalaks cherchent la compagnie de ceux qu'ils ont connus et aimés de leur vivant. Ce sont des âmes en peine, torturées par la solitude. Cet aspect qu'ils présentent les rend par moments touchants. Ce sont des vampires à la sauce slave, parfois un peu amorphes et zombifiés, mais pas toujours ! Filmés parfois en léger accéléré ( pour accentuer l'effet de mouvement surnaturel) ces wurdalaks nous font penser au Bal des Vampires de Polanski qui, déjà, utilisait ce procédé.
Je précise qu'il était fort amusant pour moi de voir un film italien, doublé en anglais, avec des voix s'efforçant de prendre l'accent slave !
Pour conclure, je ne peux m'empêcher d'apporter un léger bémol, juste pour chipoter ! La fin fait son petit effet grâce à un gros malentendu entre deux des personnages, or le comportement tout à fait illogique et inquiétant de l'un des deux induit naturellement l'autre en erreur. Pourquoi agir ainsi ? Le film ne l'explique pas du tout. Mais ne boudons pas notre plaisir ! La Nuit des Diables procure bien assez de plaisir au spectateur et s'imprime durablement dans son esprit. C'est souvent à cela qu'on reconnait un bon film.
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